Anatomie de l’invisible
Chapelle Saint-Louis de la Pitié-Salpêtrière
6 novembre - 12 décembre 2025
Pour sa première collaboration avec la chapelle Saint-Louis de la Pitié-Salpêtrière, Photo Days invite Julie Balagué à présenter Anatomie de l’invisible, une série inédite consacrée au phénomène du déni de grossesse. Rarement abordé autrement que sous l’angle du fait divers, ce trouble aux manifestations physiologique extrêmes devient ici le prisme d’une réflexion sociale, politique et sensible sur la condition des femmes et la manière dont nos sociétés façonnent leur rapport au corps.
Pendant sept ans, Julie Balagué a mené une enquête approfondie, fondée sur quinze entretiens biographiques avec des femmes ayant vécu un déni de grossesse entre 1979 et 2019. Ces récits, souvent traversés par des histoires de violence, de silence ou d’injonctions intériorisées, constituent la matière première d’un travail à la fois documentaire et plastique. Armée de son regard de photographe et de ses connaissances en sciences sociales, l’artiste s’attache à rendre perceptible ce qui échappe, et à matérialiser par l’image une expérience enfouie dans les plis de l’intime.
Ses photographies, accompagnées de textes, de dispositifs spécifiques et d’une vidéo, se situent à la lisière du visible et du dicible. En travaillant sur un sujet qui, par essence, se dérobe à la représentation, Julie Balagué interroge plus largement la photographie : comment témoigner de ce qui ne se voit pas? Comment traduire en formes, en gestes, en lumière, l’invisible, l’insaisissable, le latent ? Loin de toute illustration, son œuvre construit un récit sensible où chaque image devient un lieu d’écoute et de résonance.
Présentée au cœur de la chapelle Saint-Louis de la Pitié-Salpêtrière, Anatomie de l’invisible entre en dialogue profond avec la mémoire du lieu. Ancien espace d’enfermement des femmes pauvres, malades ou jugées « hystériques », la Salpêtrière porte l’histoire silencieuse du contrôle des corps féminins. En y installant cette œuvre, Photo Days pose un geste fort : transformer un lieu de contrainte en espace de parole et de création. Ainsi, là où les femmes furent jadis rendues invisibles, leurs voix, leurs corps et leurs histoires reprennent aujourd’hui toute leur place.